Un lieu prédestiné

L’édifice qui accueille le siège de l’Union des Fabricants n’a pas toujours abrité le Musée de la Contrefaçon. Difficile pourtant de rêver une situation plus appropriée que la rue de la faisanderie pour une association qui traque les faussaires ! Si le terme “faisanderie” est utilisé pour désigner l’enclos dans lequel l’on élève le faisan, c’est aussi un mot d’argot parisien pour désigner escrocs et voleurs – parfaitement adapté pour parler de contrefaçon, non ?

Et ce n’est pas la seule coïncidence : l’hôtel particulier est en effet lui-même une copie ! A croire qu’il était prédestiné à accueillir le Musée de la Contrefaçon… C’est vers la fin du XIXème siècle qu’un antiquaire rachète le terrain à la famille Rheims, propriétaire du 14 rue de la faisanderie. Il demande à son architecte de lui construire un bâtiment disposant d’une belle galerie de trois pièces en enfilade pour exposer ses plus belles antiquités. Pour la façade, il lui commande de réaliser la copie d’un hôtel particulier du Marais. Ironie de l’Histoire : l’original a été détruit lors des rénovations haussmanniennes…

Un lieu d’histoire

Erigé en 1901 au sein du nouveau quartier de la Porte Dauphine, l’immeuble arbore une magnifique façade dont le dessin évoque l’Orangerie du Palais de l’Élysée construit en 1718. Le double décrochage met en valeur l’élément central et confère une grande légèreté à l’ensemble. Cet effet est encore rehaussé par le majestueux escalier de marbre et la balustrade. Le grand soin apporté au choix des matériaux, aux détails de l’architecture, au dessin et à l’habillage des fenêtres et portes-fenêtres en font un bijou d’architecture remarquable, qui justifiait d’inscrire l’édifice à l’inventaire supplémentaires des Monuments Historiques, chose faite en 1972.

Dans les années 1920, la riche et jolie héritière américaine Federica Berwind rachète la maison, et lui donne le nom de son défunt mari : l’immeuble devient alors connu sous le nom d’Hôtel Seton-Porter. Elle y emploie plus de vingt personnes à son service et organise des réceptions avec des figures de la haute société parisienne des années folles. 

La deuxième Guerre Mondiale la propulse au premier rang des bénévoles de la Croix-Rouge américaine. Elle transforme alors l’immeuble en annexe de l’hôpital américain. Lorsqu’elle rentre aux Etats-Unis à la fin de la guerre, l’hôtel est laissé à l’abandon. En 1950, c’est son ami Gaston-Louis Vuitton qui rachète l’hôtel pour le compte de l’Union des Fabricants. Depuis lors, il est le siège de l’Association et du Musée de la Contrefaçon.

 

Un décor d’exception

Mais l’histoire du n°16 rue de la faisanderie ne s’arrête pas là. En 1964, par un formidable hasard, Gérard Oury, réalisateur en repérage, découvre les lieux et obtient l’autorisation d’y filmer une séquence de La Grande Vadrouille. Par un concours de circonstances heureuses, Bourvil se retrouve propulsé dans cette incroyable aventure qu’il partage avec Louis de Funès. Deux ans plus tard, la célèbre scène du « pot de peinture » immortalise la cour de l’immeuble ainsi que la fameuse treille verte du n°14. A ce propos, aviez-vous remarqué que la peinture qui tombe de la nacelle du peintre n’est pas verte mais blanche ? En effet, la peinture verte n’était pas assez visible à l’écran et a été remplacée pour la scène par du lait concentré : du vrai cinéma !

Avec le temps, de nombreux films et téléfilms ont été réalisés dans cet hôtel particulier : notamment, L’Enquête Corse (2004), Micmacs à Tire-Larigots (2009), Le Bureau des Légendes (2015).

%d blogueurs aiment cette page :